lundi 14 août 2017

In the Seventies, voyage dans la contre-culture


Les années 70 en tant qu'ère culturelle conservent une part de fantasme. Il est difficile de circonscrire  son impact culturel en une décennie de calendrier. Barry Miles, l’auteur de ce livre, considère, culturellement, une période qui irait de l’avènement des Beatles jusqu’à la fin du mouvement punk, soit de 1963 à 1977. Selon lui, beaucoup d’excès associés aux années 70 ont d’ailleurs eu lieu dans la seconde moitié des années 60.
Je n'ai pas connu cette période. Pourtant, je ne peux nier qu'elle me fascine tant elle représente en terme d'évolution culturelle et sociale.
J'ai toujours l'image d'une société propre et policée qui a prévalu jusqu’au coeur des années 60. Puis ce fut l’explosion que m’évoquent quelques noms qui claquent comme les symboles d’un monde neuf: Woodstock, les Rolling Stones, Lucy in the Sky with Diamonds, les hippies, la Factory de Warhol... Si Elvis Presley choquait par de son déhanché suggestif, moins de 20 ans plus tard, David Bowie s’exhibait en robe sur la pochette de The man who sold the world et Warhol promettait 15 minutes de célébrité aux plus désaxés de ses superstars. 
Walk on the wild side…


Puis, après la claque des punks virent les années 80, qui me paraissent plus aseptisées, presque artificielles. L’avènement du trader de Wall Street, de l’argent-roi… Gordon Gecko et Patrick Bateman comme modèle de réussite et un bûcher des vanités permanent.
Les seventies me font l’effet d’une parenthèse enchantée, une crise d’adolescence qui a déferlé sur le monde occidental avant de rentrer dans le rang.
Les seventies, ce furent dans le désordre le nouvel Hollywood, qui a ringardisé le cinéma de papa, une explosion musicale sans précédent, la libération des moeurs, l’émergence d’une scène contestaire de plus en plus active…
Ces aventures dans la contre-culture sont celles de Barry Miles, témoin privilégié de cette période.
Cet Anglais a traversé cette période, côtoyant certaines figures mythiques de la contre-culture. Cela lui donne une certaine crédibilité, d’autant qu’il semble avoir traversé cette période sans trop abuser de substances en tous genres, ce qui lui permet de pouvoir exercer un regard critique et actif sur cette période.
Barry Miles est un touche-à-tout. Il a fondé dans les années 60 la galerie/librairie Indica qui fut un haut lieu de la contre-culture à Londres. C’est d’ailleurs dans cette galerie que John Lennon rencontra Yoko Ono. Il fut aussi journaliste et correspondant de nombreuses publications culturelles des années 60 et 70, avant de rejoindre le NME comme journaliste indépendant.
Il fut aussi proche de quelques personnalités centrales comme Allen Ginsberg ou William S Burroughs. Ces survivants de la Beat generation figurent parmi les personnalités centrales de la contre-culture, à la fois modèles et membres actifs de ce mouvement protéiforme.

Résultat de recherche d'images pour "allen ginsberg farm"Au fil des chapitres qui couvrent les années 1970 à 1977, nous découvrons différents aspects de cette période. Nous pénétrons d’abord la ferme-communauté d’Allen Ginsberg, qui servait aussi de centre de désintox gratuit pour pas mal de gens. La drogue et l’alcool y étaient théoriquement interdits. L’isolement de la ferme obligeait les alcooliques à parcourir 13 km à pied pour atteindre le débit de boisson le plus proche… de quoi forcer à la sobriété.
Puis nous rejoignons communautés hippies et mystique de San Francisco, avec son florilège de doux-dingues, d’artistes d’avant-garde et de pseudo-gourous à l’égo démesuré. Puis un long détour au Chelsea Hotel, sorte de cours des miracles qui accueillait son lot d’artistes (dont une jeune poétesse, Patti Smith, et son compagnon, le photographe Robbert Mapplethorpe, alors qu’ils n’étaient encore que just kids) et de paumés anonymes avant que Miles ne rejoigne Londres, où il officie un temps comme secrétaire officieux de William S Burroughs.
Résultat de recherche d'images pour "chelsea hotel"Barry Miles livre un témoignage d’une brutale honnêteté. Il lui importe peu d’écorner l’image ce ces protagonistes. Il livre des anecdotes éclairantes. S’il est admiratif de leur talent, il ne leur voue pas un culte pour autant. Il n’est pas non plus aveuglé par le mirage d’une période fantasmée. Il en connaît les travers, les piques-assiettes, les ordures, les profiteurs... Il n’occulte pas la violence de cette période, ouvrant son livre sur un attentat du Weather Underground et parlant de la répression violente dans les campus universitaires, lorsque la police n’hésitait pas à tirer à balles réelles.


Ce livre m’a permis de m’éloigner d’une certaine imagerie d’Epinal, des gentils hippies (alors qu’Altamont avait déjà sonné le glas de l’utopie) et de voir un autre aspect que les images policées de la télévision, entre Abba, la fièvre disco et Maritie & Gilbert Carpentier.

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